Mallory Porter | face Nord de l'Aiguille du Midi
Jeudi 30 mai 2019
Mercredi soir 18 heures, je reçois un appel de Lilian pour planifier la sortie du lendemain. "J'ai une intuition, le Mallory est en condition". Je ne m'attendais pas à une telle proposition et contacte Romain qui sera aussi de la partie pour avoir son avis. Il a l'air plutôt emballé donc je me laisse séduire par cette idée ambitieuse.
Jeudi matin 8 heures, on se retrouve tous les trois devant le téléphérique de l'aiguille du Midi (ou plutôt Disney Land) pour essayer de prendre la première benne, pas si évident que ça un jour férié... On discute des conditions avec quelques locaux, nous avons peu d'info car le Mallory n'a été skié qu'une seule fois à notre connaissance cet hiver. On arrive à repérer les conditions de cette impressionnante face Nord en montant avec la benne. Je ne suis vraiment pas fan de l'aseptisation de la montagne mais il faut avouer que dans certains cas ça rend service. Le remplissage est correct mais au moins deux rappels seront nécessaires.
On se prépare tranquillement avant d'attaquer la descente de l'arête de l'Aiguille du Midi jusqu'à l'entrée de la face. On espère pouvoir passer en ski mais la glace vive affleurant nous convainc de jouer la sécurité en faisant un rappel. Un peu d'apréhension pour moi à ce moment-là, mais les potes sont là pour me remotiver. Après avoir fait une lunule on descend chacun notre tour en rappel sur une vingtaine de mètre pour retrouver la neige. Bonne surprise, on a de la bonne poudre légère ce qui nous permet de skier la première partie détendus en enchainant les virages. La pente se raidit, on plonge dans la face en restant vigilent, les cailloux ne sont pas très loin. On arrive au premier ressaut, la face est au soleil depuis déjà un bon moment (c'est une face Nord mais on est quand même fin mai) et la neige commence à s'alourdir. Le premier ressaut se négocie bien malgré un peu de neige dure/glace et nous amène au premier rappel.
On est maintenant sur la grande pente suspendue qui est en bonne poudreuse, on croit rêver mais non c'est bien réel et Romain enchaîne les premier virage. Surement les plus beaux virages de la descente, peut-être même de la saison tellement l'ambiance est incroyable dans cet itinéraire mythique. Retour à la réalité, changement de neige brutal en arrivant dans l'entonnoir, la neige est béton... Lilian tente le coup en ski mais renonce rapidement, on fera un rappel pour éviter ce passage goulotté.
Les conditions ne sont pas vraiment meilleures sur la dernières petite pente suspendue pour rejoindre le rappel final mais ça passe. Il faut rester concentré, la tension se fait sentir, on commence à être usé mentalement (il faut dire qu'on a pas été très rapide) mais ce n'est pas le moment de se relâcher !
On fait le dernier rappel qui nous amène sur la dernière pente avant de rejoindre le couloir final. Après une courte hésitation sur l'itinéraire à suivre on trouve le bon. La pente s'adoucit progressivement dans le couloir final et retrouve les traces menant au Plan de l'Aiguille. C'est bon, on peut souffler. L'émotion est grande, un itinéraire de plus qui nous faisait rêver, et en plus partagé avec les potes !